Le vieillissement est-il un art, consistant à valoriser ce que l’on a plutôt que pleurer sur ce que l’on n’a plus ? En tous les cas, on perçoit bien qu’après 50 ans, une forme de danse entre passé, présent et avenir se joue dans nos corps et nos esprits. Et que c’est à nous de la rendre fluide et plaisante. Quand le cumul de années est associé à une perte, à une diminution des capacités et une hausse des souffrances, il faut nous bouger les fesses : utilisons l’imagination, l’énergie et la confiance pour contrer cette vision et profiter de la vie.

Réaliser que l’on perd la faculté d’utiliser ses 5 sens constitue pour moi la réelle manifestation du vieillissement. Car les sens, qui nous permettent d’appréhender le monde extérieur et intérieur, constituent la première source du plaisir physique. Le plaisir de communiquer (entendre, et donc écouter et converser), le plaisir de contempler (voir, donc regarder), le plaisir du contact, en particulier en touchant les gens que l’on aime, celui de manger et de goûter ces plats appétissants, celui de respirer et de sentir les parfums si intimes.

Quand nos 5 sens, la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher et le goût, fonctionnent de façon optimale tous à la fois, nous sommes amenés à ressentir ce que la vie a de plus puissant. Les émotions viennent alors de la profondeur de notre être, telles que le désir sexuel, l’amour, la haine, la peur, la confiance. Les années aidant, tout cela s’apaise, ce qui n’est pas si désagréable, après tout.

Alors que j’apprends que je vais devoir porter des appareils auditifs, je cherche à me convaincre qu’il est tout à fait possible de compenser la perte de nos sens. En fait, je découvre dans cette quête qu’il existe vraiment des tas de stratégies et de techniques pour maintenir notre qualité de vie à mesure que nos sens évoluent… à condition de les utiliser.

Les 5 sens, une caractéristique humaine et animale

On perçoit le monde extérieur par nos sens, et c’est formidable d’y être attentif le plus souvent possible. Ils s’opposent un peu à la pensée : celle-ci se déroule mentalement, dans notre cerveau, alors qu’eux sont une manifestation d’autres organes. Les balades d’émerveillement (awe walk) qui consistent à observer la vie de la nature qui fourmille tout autour de nous, sont une très bonne occasion de prendre de la mesure du pouvoir régulateur, à la fois stimulant et apaisant, de nos sens.

Ils sont véhiculés par des zones déterminées et possèdent une fonction aussi précise qu’essentielle. Aristote en dénombrait cinq. Depuis peu, on tend à en ajouter deux, ou même plus : le sens de l’équilibre (système vestibulaire), le sens de la position des organes et surtout des muscles (système proprioceptif), la perception de la douleur (sens algique) et la thermoception (perception de la température).

Les animaux possèdent d’autres sens comme l’électroperception (capacité à détecter les champs électriques, répandue chez les poissons) et bien sûr la magnétoception, qui permet aux oiseaux et poissons migrateurs d’identifier les champs magnétiques et de s’orienter au cours de leurs très longs déplacements. Voilà bien un pouvoir extraordinaire que j’aurais adorer posséder !

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Voir moins bien, entendre moins bien, avaler moins bien…

En plus de nos rides, vieillir diffuse dans nos chairs. On mange par exemple des aliments qu’on détestait quand on était petite, tout simplement car on a beaucoup moins de papilles, ces récepteurs du goût qui sont placés sur la langue. Le nombre et leur masse diminuent, ce qui engendrent une moindre finesse des nuances alimentaires. Même chose pour l’odorat, lié aux sécrétions de la bouche et du nez : avec l’âge elles diminuent, du coup notre perception aussi. Tout peut finir par devenir fade quand on vieillit.

A l’inverse, les récepteurs sensoriels des bébés sont très développés, ce qui peut provoquer chez eux des réactions fortes à ce qui est perçu comme une agression. Cette purée d’épinards qui nous semble si réussie active trop de papilles et les dégoute, purement et simplement.

Tous les sens baissent de façon commune, même si les organes sur-sollicités sont les plus atteints. On peut s’appareiller pour remédier à cette baisse. Les prothèses les plus communes sont bien sûr les lunettes ou les lentilles (sachant qu’on peut aussi faire corriger sa vision au laser). Les appareils auditifs se développent et deviennent de plus en plus invisibles et efficaces, parions que nous finirons toutes par en porter. Concernant le goût, le plus important est de soigner attentivement ses dents et de porter des prothèses dentaires si nécessaire : plus on doit se priver de certains aliments car on ne peut pas les manger, plus le sens du goût diminue.

L’odorat et le toucher, plus difficiles à substituer

En revanche nous n’avons pas de système de correction concernant l’odorat ni même le toucher. Vous vous souvenez probablement de ce livre remarquable dont le personnage principal nait sans odorat : Le parfum. Les allergies aux parfums naturels ou synthétiques sont devenues nombreuses, au point où les établissements hospitaliers ou les Ehpads aux USA les interdisent formellement. Pourtant le flair, au propre et au figuré, c’est une capacité qui tient de l’instinct, qui parle de notre mémoire et de ces impressions inexpliquées, tenaces et terriblement authentiques.

Je vous laisse méditer sur ces deux phrases : « je ne peux pas le sentir ! » comme savent si bien dire les femmes, et l’équivalent masculin « je ne peux pas la voir ! ».

Les maladies peuvent aggraver la déficience sensorielle, et je pense ici à l’arthrose dans les doigts, qui fait qu’il devient difficile de saisir quelque chose, et donc d’éprouver une sensation liée à cette chose. L’hypoesthesie consiste, elle, à ne plus ressentir le sens du toucher suite à un mal fonctionnement du nerf impliqué, induit par exemple par une maladie.

Ne plus sentir avec ses doigts est handicapant et vécu comme un facteur d’isolement, comme d’ailleurs n’importe quelle perte des sens. Car les organes qui les véhiculent sont de grands apporteurs d’information factuelle sur nous-même, notre environnement et notre entourage. Lorsque leur acuité diminue, on devient littéralement moins informé, et donc un peu plus perdu, un peu plus éloigné de la réalité physique.

Après les lunettes, l’appareil auditif

Je vous raconte tout ça car je viens d’apprendre que je vais devoir porter des appareils auditifs (j’ai déjà des lunettes, depuis une trentaine d’années). Ma famille me serine depuis un temps fou que je parle trop fort, évitant d’affirmer frontalement que je deviens de plus en plus sourde. Être bigleuse, passe encore, mais être sourde, c’est un peu la honte. J’ai mis longtemps à admettre que je répondais assez souvent à côté de la plaque aux questions qu’on me posait. Et je réalise désormais que les groupes au restaurant, ça me perturbe – ceux avec qui je suis, et les autres à l’autre bout de la salle, qui m’empêchent de me concentrer.

Un médecin ORL m’a procuré une ordonnance (sans même tester mon audition : personne ne réclame un appareil pour le plaisir, c’est donc que j’en ai besoin – et en plus les prothésistes refont systématiquement les tests avec leur propre équipement). Je ne manquerai pas de vous raconter les aléas de cette nouvelle aventure auditive, et j’espère bien entendu vous donner envie d’en faire autant si vous sentez que votre ouïe vous fuit.

Je suis une grande bavarde mais aussi une grande questionneuse et une écouteuse avertie. C’est donc une plaie de ne plus pouvoir aussi facilement participer aux conversations et de devoir lancer : « tu peux répéter, là ? »

Autre raison ayant motivé ma décision : la perte auditive est un facteur aggravant des problèmes cognitifs et autres démences ! Au passage, la perte de tous les sens, est pénalisante, y compris celle de la vue. A contrario, en écrivant cet article, je suis tombée sur ce texte affirmant qu’il existe une corrélation entre l’intelligence, la bonne santé et la mauvaise vue : les porteurs de lunettes sont bien les bons élèves. Bon, c’est déjà ça de pris !

Le rôle de l’alimentation dans l’expression des 5 sens

Puisque les sens sont véhiculés par le corps, l’optimisation de notre santé globale est la première des actions à mettre en œuvre pour justement entretenir ce corps qui tremble dans ses fondations. Une alimentation équilibrée et colorée (les vitamines adorent se cacher dans les pigments des végétaux jaunes, rouges ou verts pomme, entre autres), associée au duo exercice physique/ gestion du stress, contribue à maintenir notre anatomie en forme et à ralentir le déclin sensoriel.

Toutes celles qui mangent bien et bougent bien savent combien se sentir solide et entière contribue au bien-être et à notre avancée dans la vie. Toutes celles qui ne le font pas se mettent à culpabiliser… sans pour autant changer de comportement. Il est terriblement difficile de renoncer à ses routines et à ses principes. Je ne suis pas certaine qu’augmenter l’inconfort y fasse grand-chose : finalement, on s’habitue bien à se sentir mal. Le mieux, c’est vraiment d’accepter de s’informer en profondeur en trouvant la bonne personne, celle qui sait nous convaincre alors que jusque-là on a freiné des quatre fers.

La recherche montre combien certains nutriments contribuent à la santé de nos sens, comme les oméga-3 pour la vue et les vitamines B pour l’ouïe. Inutile de vous ruiner dans des suppléments dont, une fois encore, les effets réels n’ont jamais été prouvés : c’est la variété alimentaire et l’utilisation de produits non dénaturés (plutôt que des extraits) qui constitue la source de la richesse nutritionnelle.

Sachant que l’effet placebo compte : en s’arrangeant pour trouver le budget, puis acheter un extrait de ceci ou de cela puis l’avaler scrupuleusement chaque matin, on se prouve qu’on s’occupe de soi, ce qui pousse à améliorer d’une façon ou d’une autre notre état général. Par exemple, celles d’entre vous qui prennent de la gelée royale pour se rebooster vont aussi se reposer davantage ou marcher deux kilomètres de plus quotidiennement… ce qui effectivement va finir par les rebooster.

Remarquons encore une fois l’extraordinaire agencement naturel qui fait que notre santé dépend du plaisir de la cuisine, qui dépend de la variété des produits, qui dépend de l’approvisionnement disponible, qui dépend de l’environnement agricole, qui dépend des saisons… Toute la boucle de la vie planétaire s’harmonise en art de vivre et fini par servir notre vitalité au quotidien !

Le rôle des interactions dans la préservation des 5 sens

En deuxième lieu, il y a l’engagement social. L’interaction humaine est un puissant stimulateur pour nos sens et notre cerveau. Que ce soit en discutant avec des amis, en participant à des activités collectives ou en se plongeant dans des hobbies créatifs, le maintien d’un engagement actif avec le monde aide à compenser les pertes sensorielles. A l’inverse, moins on utilise ses sens, moins on les stimule et plus ils nous échappent.

Les entreprises s’intéressent, de gré ou de force, au bien-être de leurs salariés, et en particulier au plaisir ressenti sur le lieu de travail. Cet article fait le tour d’idées mises en place pour stimuler les 5 sens, et ça n’est pas si bête.

L’adaptation est fondamentale. Par exemple, si la vue diminue, on se tourne automatiquement vers l’ouïe et le toucher pour nous guider. Si le goût et l’odorat s’estompent, nous pouvons expérimenter avec des textures et des épices pour donner plus de peps à nos repas.

Progressivement les personnes très âgées perdent l’envie de manger : elles ne ressentent plus ces plaisirs gustatifs qui les ont pourtant incitées à manger plusieurs fois par jour, pendant des décennies, les obligeant ainsi à se tenir en vie. Au bout d’un moment, la pression vitale n’est plus si urgente, l’esprit se lasse de cette course contre la montre organique, on aspire à se trouver dans un monde où le temps n’a plus court…

Dans l’ensemble, le vieillissement est une aventure, pas une épreuve (enfin, c’est ce que je me dis). C’est une opportunité de croissance, de changement et de découverte. Il n’est pas seulement un phénomène biologique, mais aussi un processus social. Dans de nombreuses cultures, l’âge est associé à l’autorité, au respect et à la sagesse. La perte des sens peut donc être vue non pas comme un déficit, mais comme une phase de la vie qui rapproche de la communauté. Il est intéressant de réaliser qu’elle génère alors une autre forme d’intelligence, faite de bonté et d’empathie, qui bénéficie à tous.

L’impact des techniques et des technologies

La société a un rôle à jouer pour faciliter l’adaptation à la perte sensorielle. Cela commence directement dans la rue : je pense par exemple aux revêtements des chaussées évitant d’éblouir les yeux, à la réduction de la pollution sonore ou à celle de la puanteur liée aux gaz d’échappement. La rue va (enfin, elle devrait) bientôt être beaucoup plus agréable et sûre à emprunter pour les piétons fragiles, ce qui va bien sûr contribuer à leur bien-être sensoriel.

Les nouvelles technologies, comme les appareils auditifs avec Bluetooth ou les écrans (si décriés par ailleurs, mais qui facilitent la lecture grâce au réglage de la lumière et de la taille des lettres) jouent un rôle majeur dans la lutte contre l’isolement provoqué par la perte des sens. Parions que leur importance ne va cesser de se développer. Lorsque nous, les quinquas, seront très âgées, nous aurons à disposition des tas d’outils connectés pour nous permettre de prolonger cette vie terrestre, qui serait sinon devenue infernale, sans ouïe, vue, goût, odorat ou toucher pour nous aider à nous repérer.

La philosophie et la psychologie ont aussi leur mot à dire

Un mot sur le plan philosophique, en particulier sur le stoïcisme. Selon cette philosophie ancienne qui prône le détachement, nous devons accepter les choses que nous ne pouvons pas changer… et concentrer notre énergie sur celles que nous pouvons. La perte des sens peut être inévitable, mais la manière dont nous réagissons à cette perte est entre nos mains. En adoptant une attitude d’acceptation et en cherchant activement à nous adapter, on trouverait une paix et une satisfaction profondes. 

Bon, il ne reste plus qu’à essayer. Cicéron a beaucoup écrit sur ce thème : « Savoir vieillir ». D’autres philosophes se sont penchés sur le sujet, comme Montaigne ou Bergson, découvrez-les ici.

Tout le monde s’y met pour tenter de nous rassurer sur le déclin qui nous attend, en pratiquant des activités qui ont fait les preuves. Cet article explore des pistes intéressantes sur les liens entre résilience et vieillesse et donne des exemples d’ouvrages correspondant aux thèmes : témoigner, militer, créer, aimer, rire et transmettre. 

Bref : le vieillissement n’est pas une maladie (même si l’un n’empêche par l’autre), mais une partie naturelle et totalement inévitable de la vie. Il s’accompagne, dans le meilleur des cas, de sagesse, d’expérience et de perspectives que la jeunesse ne peut ni offrir ni même imaginer. Reste à nous convaincre qu’il s’agit d’une transformation, pas d’une dégradation, et qu’il suffit de nous adapter. Arrangeons-nous pour que la perte des sens ne soit pas une condamnation, mais une invitation à approfondir notre appréciation de la vie, à explorer de nouvelles façons de nous engager dans le monde et de communiquer. 

En attendant, portez donc vos lunettes plutôt que de planquer dans votre sac à main, et efforcez-vous de voir la vie en rose…

La totalité de ce blog est consacrée au renouveau des femmes et des mères après 50 ans : ménopause, vieillissement, alimentation, carrière, amies, sexe… Je traite de la multitude de sujets qui nous préoccupent, sur une centaine d’articles. Mais avant tout, abonnez-vous à ma newsletter du dimanche matin : je me lève tôt pour vous donner des idées, du courage et de la joie !

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Et vous, que faites-vous pour contrer la perte des 5 sens ?

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